La violence routière est à l’origine de drames qui frappent les victimes, mais aussi leurs proches. Les responsables peuvent être des conducteurs qui n’ont pas le permis de conduire, qui ont consommé des stupéfiants ou de l’alcool, ou qui commettent un grand excès de vitesse ou une violation délibérée du code de la route.

Une proposition de loi  transpartisane « créant l’homicide routier et visant à lutter contre la violence routière » a été adoptée par l’Assemblée nationale cette semaine. Ce délit d’homicide routier sera constitué en cas d’accident mortel causé par un automobiliste à la suite d’une conduite délibérément à risque (état d’ivresse, prise de drogues, conduite sans permis…). Dans la même logique, un délit de « blessures routières » est prévu.

Cette proposition de loi vise à instaurer des qualifications spécifiques, distinctes de l’homicide involontaire et de l’atteinte à l’intégrité physique des personnes, dès qu’une circonstance aggravante est constatée lors d’une infraction routière. La création de ce régime spécifique répond à une demande des familles des victimes et à une meilleure responsabilisation des auteurs d’infractions.

Sont également prévues des peines complémentaires, dont certaines sont obligatoires, prononçables par le juge. Par ailleurs, cette proposition de loi instaure nouvellement le port du téléphone portable tenu en main ou l’usage d’écouteurs comme une circonstance aggravante pour la qualification de l’homicide routier.

Le contexte

Les infractions routières touchant involontairement à l’intégrité des personnes physiques sont actuellement qualifiées sous le régime des homicides involontaires ou d’atteintes involontaires à l’intégrité de la personne (chapitres 1er et 2 du titre II du Livre II du code pénal).

Ce régime général de l’homicide involontaire, applicable aux accidents de la route, est prévu par l’article 221-6 du code pénal : « le fait de causer, dans les conditions (…), par maladresse, imprudence, inattention, négligence ou manquement à une obligation de prudence ou de sécurité imposée par la loi ou le règlement, la mort d’autrui constitue un homicide involontaire puni de trois ans d’emprisonnement et de 45 000 euros d’amende ».

Afin de lutter spécifiquement contre les infractions routières, un article L.221-6-1 du Code pénal a été créé. Cet article prévoit 5 ans d’emprisonnement et 75 000 euros d’amende « lorsque la maladresse, l’imprudence, l’inattention, la négligence ou le manquement à une obligation législative ou règlementaire de prudence ou de sécurité (…) est commis par le conducteur d’un véhicule terrestre à moteur ».

Depuis la loi dite « Badinter » du 5 juillet 19852, il existe un régime spécifique d’indemnisation des victimes d’accidents de la circulation

Nouveaux délits « homicide routier » et « blessures routières »

De nouveaux délits d' »homicide routier » et « de blessures routières » sanctionneront désormais les conducteurs ayant causé, sans intention volontaire, la mort ou des blessures ayant entraîné une incapacité totale de travail (ITT) de moins ou plus de trois mois, dans certaines circonstances aggravantes :

  • violation délibérée du code de la route ;
  • état d’ivresse ou refus d’un contrôle d’alcoolémie ;
  • consommation de drogues ou refus d’un test salivaire ;
  • consommation volontaire de substances psychoactives de façon détournée ou manifestement excessive (par exemple usage détourné du protoxyde d’azote ou surconsommation de médicaments) ;
  • conduite sans permis ;
  • excès de vitesse de 30 km/h ou plus ;
  • délit de fuite ;
  • non-assistance à personne en danger ;
  • utilisation d’écouteurs ou d’un téléphone à la main ;
  • refus d’obtempérer ;
  • participation à un rodéo urbain

Il est important de noter que la  proposition de loi ne modifie pas les peines principales encourues. L’homicide routier et les blessures routières seront passibles des mêmes peines que celles prévues aujourd’hui pour homicide ou atteinte involontaire commis par un « chauffard ». En cas d’accident mortel, les peines maximales restent de 7 ans de prison et 100 000 d’amende s’il y a une seule circonstance aggravante (telle une conduite en état d’ivresse) et de 10 ans de prison et 150 000 euros d’amende en cas de pluralité de circonstances aggravantes (comme une conduite sans permis et en excès de vitesse).

Quelques chiffres

En 2022, 3 267 personnes ont trouvé la mort en France métropolitaine. Après une baisse régulière de la mortalité routière (en partie à la faveur de la crise Covid limitant les déplacements), cette dernière est en légère augmentation (+19 morts) par rapport à 2018 pour revenir à son niveau de 2013.

L’alcool est responsable de 30% de la mortalité routière.

Dans un accident mortel sur cinq, un conducteur est positif aux stupéfiants. Ce taux atteint un accident mortel sur trois durant les week-ends. Dans les accidents mortels, 12 % des conducteurs contrôlés sont positifs aux stupéfiants. En 2021, 436 personnes ont été tuées dans un accident impliquant des stupéfiants (test statistique incomplet). En 2021, sur 6,65 millions de contrôles 1,88 million d’infractions pour excès de vitesse ont été relevées, soit plus d’un quart du total (28,3 %).

Sur le plan conjoncturel, les six premiers mois de l’année 2023 pour la France métropolitaine présentent une réduction significative de -11 % de la mortalité par rapport à 2022.

La proposition de loi a été adoptée par les députés en 1ere lecture. Le texte doit être examiné par le Sénat dès son inscription à l’ordre du jour.

En savoir : consulter le dossier législatif