Les grandes orientations de la politique énergétique du pays d’ici à 2035 ont été mises en consultation du public jusqu’au 15 décembre.

La stratégie française énergie-climat doit permettre de répondre à deux obligations législatives : présenter une loi de programmation énergie-climat tous les cinq ans (désormais appelée loi de production d’énergie), comme le demande la loi énergie-climat de 2019, et mettre à jour le plan national intégré énergie-climat de la France pour répondre aux nouveaux objectifs européens du paquet « Fit for 55 » pour 2030.

Le document sera complété par un projet de loi sur la production d’énergie, qui comprendra « un volet programmatique » ainsi que des dispositions sur « la production, les prix de l’énergie et la protection des consommateurs » pour traduire entre autres l’accord trouvé mi-novembre entre EDF et le gouvernement sur les prix de l’électricité nucléaire à partir de 2026.

Trois défis

Les grandes orientations de la politique énergétique s’inscrivent dans la lignée du discours de Belfort de février 2022 et du discours d’Emmanuel Macron sur la planification écologique de septembre 2023. Elles s’appuient aussi sur les travaux du SGPE, sur la concertation citoyenne menée à l’automne-hiver 2022-2023 ainsi que sur les conclusions des groupes de travail pilotés par des élus locaux et parlementaires sur l’énergie.

Elles fixent trois défis :

  • la baisse de la consommation d’énergie finale de « – 40 à – 50 % » d’ici à 2050 par rapport à 2021, pour passer de 1 611 TWh à 900 TWh d’énergie consommée (alors que le discours de Belfort ne retenait que l’objectif de – 40 % et que la loi de transition énergétique de 2015 fixait – 50 % par rapport à 2012) ;
  • la fin de la production d’électricité à partir de charbon en 2027 et la sortie de la dépendance aux énergies fossiles en 2050. Pour rappel, Emmanuel Macron avait annoncé la fermeture des quatre dernières centrales à charbon de métropole pour 2022 mais deux d’entre elles (Cordemais et Saint-Avold) ont été maintenues en fonctionnement pour assurer la sécurité énergétique du pays et font l’objet d’une tentative de conversion à la biomasse. Par ailleurs, les énergies fossiles représentent 60 % de la consommation d’énergie. L’objectif est de passer à 42 % en 2030 et 29 % en 2035.
  • l’augmentation de la production d’énergie. La production d’électricité doit augmenter de 10 % d’ici à 2030 et de 55 % en 2050 pour répondre à l’électrification des usages, tandis que la production de chaleur bas carbone doit doubler entre 2021 et 2035.

Ces trois défis seront atteints via quatre leviers de la politique énergétique:

  • Les deux premiers reposent sur la réduction de 30 % de la consommation d’énergie en 2030 par rapport à 2012, grâce à la sobriété et l’efficacité énergétique, ce qui sous-entend « une accélération forte de l’effort ». Il s’agit en effet d’un objectif plus ambitieux que la PPE 2 puisque celle-ci fixait un objectif de – 16,5 % de consommation d’énergie en 2028 par rapport à 2012.
  • Le gouvernement entend soutenir la structuration des filières industrielles sur la rénovation énergétique ou encore les véhicules électriques pour atteindre cette cible.

Construire de nouveaux réacteurs nucléaires

L’augmentation de la production d’énergie repose quant à elle sur les filières nucléaire et renouvelables. Sur le nucléaire, le document prolonge la durée de vie des réacteurs existants au-delà de 50 ans, sauf question de sûreté, et revient ainsi en arrière sur l’un des objectifs de la loi de transition énergétique de 2015. Un objectif conservateur de production nucléaire de 360 TWh est fixé sur le parc existant pour 2030, en tenant en compte de l’EPR de Flamanville qui doit être mis en service en 2024. Pour rappel, la production nucléaire a atteint son plus bas niveau en 2022 avec 279 TWh et EDF vise 300 à 330 TWh pour 2023.

La construction de six EPR 2 est actée, pour une mise en service attendue entre 2035 et 2042 et une décision sera prise en 2026 sur la construction éventuelle de huit EPR 2 supplémentaires. Dans le domaine des petits réacteurs, est attendue d’ici à 2030 la construction d’une tête de série de SMR à eau pressurisée (Nuward) et d’un prototype de petit réacteur innovant. L’orientation pérenne de semi-fermeture du cycle du combustible devra être aussi confirmée.

Accélération de la production d’énergies renouvelables

En matière d’énergies renouvelables, la France vise le doublement du rythme de déploiement du photovoltaïque, du biogaz et des réseaux de chaleur d’ici 2030 et le quadruplement pour la géothermie.

L’éolien terrestre est la seule filière appelée à maintenir le rythme actuel de 2022, soit un changement d’orientation qui réjouit la filière depuis le discours de Belfort durant lequel Emmanuel Macron avait appelé à « être raisonnable ».

Enfin, l’éolien en mer est appelé à passer des 0,5 GW installés à ce jour (à Saint-Nazaire) à 18 GW en 2035.

Ces objectifs sont d’autant plus ambitieux que la France reste en dessous des objectifs qu’elle s’était fixés dans la PPE 2 (2019-2023). Ainsi, pour le photovoltaïque, la puissance installée a atteint 18 GW à la fin du premier semestre contre 18,9 GW inscrits dans la PPE. Pour l’éolien terrestre, la puissance installée est de 21,6 GW contre un point de passage fixé à 23,2 GW, tandis que l’objectif d’éolien en mer de 2 GW n’est pas tenu avec seulement un parc de 0,5 GW installé (et deux parcs dont la mise en service est attendue cet hiver pour environ 1 GW).

Pour la chaleur renouvelable, le rythme de déploiement a été deux fois plus faible que celui prévu pour la PPE, malgré une augmentation du fonds chaleur depuis 2018.

Bientôt une 3e Stratégie Nationale Bas Carbone (SNBC)
La troisième SNBC, qui sera mise en consultation prochainement, devra fixer un budget carbone pour la période 2024-2028 ainsi que des projections pour les périodes 2029-2033 et 2034-2038. Elle intégrera aussi pour la première fois des budgets carbone indicatifs pour les soutes internationales (aérien et maritime).

La trajectoire de réduction de l’empreinte carbone de manière devra être cohérente avec l’accord de Paris, c’est-à-dire compatible avec une limitation du réchauffement planétaire à 1,5 °C. Les premières estimations suggèrent que la cible pourrait être une réduction de 80 % de notre empreinte carbone en 2050″, en prenant en compte les soutes internationales (aérien et maritime) et les émissions importées.

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Avec l’AEF