Ces 25 questions-réponses vous permettront de mieux comprendre les mesures de protection des riverains prises par l’Etat en application de la loi EGAlim d’une part et en suivant les recommandations du Conseil d’Etat  pour mieux encadrer l’utilisation des produits phytopharmaceutiques en l’absence de disposition de protection des riverains, d’autre part.
Le cadre national des zones de non traitement (ZNT) en France repose sur la mise en œuvre d’un décret et d’un arrêté ministériel :

1. A qui s’appliquent les distances de sécurité ?

Les distances de sécurité s’appliquent aux bâtiments habités ainsi qu’aux lieux hébergeant des personnes vulnérables tels que définis à l’article L 253-7-1 du CRPM.
Les bâtiments habités sont des lieux d’habitation occupés. Ils comprennent notamment les locaux affectés à l’habitation, les logements d’étudiants, les résidences universitaires, les chambres d’hôtes, les gîtes ruraux, les meublés de tourisme, les centres de vacances…, dès lors qu’ils sont régulièrement occupés ou fréquentés.
Les chartes peuvent prévoir des modalités particulières pour prendre en compte le caractère irrégulier ou discontinu de l’occupation d’un bâtiment (activité saisonnière, périodes d’ouverture…), étant rappelé que le risque d’exposition peut persister plusieurs jours après le traitement (exposition cutanée par les dépôts au sol ou exposition respiratoire par les revolatilisations).

2. Qu’est-ce qu’une distance de sécurité au sens de l’arrêté du 27 décembre 2019 ?

Une distance de sécurité désigne l’éloignement minimal entre la zone à protéger et le végétal ou la surface qui reçoit directement le produit phytopharmaceutique, à l’exception des produits de biocontrôle auxquels les distances ne s’appliquent pas et sous réserve des dispositions particulières éventuelles des autorisations de mise sur le marché (AMM).
Elle définit la largeur de ce qui est couramment appelé une zone de sécurité ou « zone non traitée » (ZNT), étant rappelé que l’utilisation des produits de biocontrôle reste autorisée et sous réserve des dispositions particulières éventuelles des autorisations de mise sur le marché (AMM).
La distance de sécurité prévue dans l’arrêté du 27 décembre 2019 s’applique en absence de dispositions spécifique dans l’AMM. Lorsque l’AMM précise, parmi les conditions d’utilisation, une distance de sécurité, cette dernière rend caduque la distance administrative, qu’il s’agisse de la distance prévue à l’article 14-1 ou des distances prévues à l’article 14-2.
La distance de sécurité prévue à l’article 14-1 (distance incompressible de 20 mètres) ne peut être adaptées dans le cadre des chartes.

Les distances de sécurité prévues à l’article 14-2 peuvent être adaptées dans le cadre des chartes d’engagements selon les modalités prévues par l’arrêté du 27 décembre 2019 (voir question 22). Ces distances pourront être actualisées après avis de l’Anses selon la procédure décrite dans l’arrêté.
Les distances de sécurité peuvent donc varier selon le produit appliqué et le matériel utilisé. De ce fait, il n’est pas possible de se prononcer sur la conformité de la pratique à la simple vue du pulvérisateur et de son éloignement par rapport aux habitations.

3. Qu’est-ce qu’une culture emblavée au titre d’un cycle cultural ?

Il s’agit, dans le contexte de l’arrêté du 27 décembre 2019, d’une culture annuelle semée à l’automne pour être récoltée en 2020, telle que les céréales d’hiver ou le colza d’hiver. Les cultures pluriannuelles (par exemple la luzerne) ou pérennes (vigne, vergers etc.) ou les couverts végétaux en interculture ne sont pas des cultures emblavées au sens de l’arrêté.
Pour ces cultures annuelles déjà implantées avant le 1er janvier 2020, les distances de sécurité de l’article 14-2 ne s’appliqueront qu’à compter du 1er juillet 2020. La distance de sécurité de 20 mètres prévue à l’article 14-1 est applicable depuis le 1er janvier 2020 dans toutes les situations.

CHARTES

4. Peut-il y avoir plusieurs chartes dans le même département ?

Oui, dans la mesure où une charte peut ne concerner qu’une utilisation spécifique de produits phytopharmaceutiques (utilisations agricoles et non agricoles par exemple). De plus, une charte peut être ciblée sur une activité ou une filière agricole particulières.
Lorsqu’une utilisation de produits phytopharmaceutiques est déjà couverte par une charte, il est préférable que les organisations d’utilisateurs s’abstiennent d’élaborer une autre charte incluant la même utilisation.

7. Que recouvre la notion de concertation ?

La concertation vise à recueillir les observations des riverains ou de leurs représentants et des associations départementales ayant pour objet statutaire la défense des intérêts collectifs des habitants sur les chartes.
La concertation implique que le décideur, non seulement écoute mais également prend autant que possible en considération un certain nombre de remarques, d’amendements ou de propositions.
La concertation peut être organisée « par tout moyen » selon l’article D. 253-46-1-3, dans le respect des modalités prévues par le décret (voir question 8). Elle peut notamment être conduite sur internet.
La participation des maires et des associations de maires du département à la concertation doit être recherchée. Elle peut reposer sur leur accès direct à la concertation mise en œuvre pour les riverains et les associations de riverains, ou via un mode spécifique de recueil des observations, complémentaire de celui mis en œuvre pour les riverains.

8. Quelles sont les modalités de la concertation sur le projet de charte ?

Le décret du 27 décembre 2019 prévoit que les organisations qui élaborent les projets de charte soumettent ces derniers à une concertation publique. Cette concertation doit respecter les exigences suivantes :

  • Durée minimale d’un mois
  • Annonce par un avis dans un journal de la presse locale largement diffusé dans le département (presse quotidienne régionale en particulier). Une publication dans la presse spécialisée, par exemple la presse agricole régionale, n’est pas suffisante pour informer toutes les parties concernées.
  • L’avis précise notamment les modalités d’accès au projet de charte, les conditions de recueil des observations (site internet, adresse mail et/ou postale, réunions publiques, etc…), la durée de la concertation ainsi que les modalités de réalisation et de publication de la synthèse des observations recueillies.

La concertation s’effectue avec les riverains entrant dans le périmètre de la charte ou leurs représentants, ainsi que les associations de défense des intérêts collectifs des habitants dont le périmètre d’action géographique correspond à celui du projet de charte. Les maires des communes concernées et l’association des maires du département sont associés à la concertation.
L’organisation à l’origine de la charte publie la charte issue de la concertation sur au moins un site internet dans un délai de 2 mois après la fin de la concertation.

9. Que recouvre la notion d’information ?

L’information peut être générale et couvrir une période d’activité, sous la forme d’un calendrier prévisionnel par exemple, ou porter sur un ou plusieurs traitements donnés. En fonction des modalités retenues pour sa communication, l’information peut comporter des précisions sur la nature du ou des traitements réalisés, leur finalité, des mentions d’avertissement, ou tout autre élément d’information utile.
La charte précise la ou les modalités applicables pour la communication (site internet, document écrit, affichage, , etc.) et pour le contenu de l’information correspondante.

10. Quelles sont les « modalités d’information préalable, y compris des délais de prévenance des résidents » qui peuvent figurer dans les chartes ?

L’information préalable des résidents est facultative. Elle peut contribuer à minimiser les expositions (week-end, vacances scolaires par exemple). Des exemptions pour les traitements réalisés en urgence peuvent être prévues.
La charte peut préciser le contenu d’un message d’information préalable.

11. Quelles sont les distances de sécurité qui doivent figurer dans les chartes ?

Les chartes incluent « les distances de sécurité et les mesures apportant des garanties équivalentes définies en application de l’article L. 253-7 », c’est-à-dire les distances de sécurité et les modalités de réduction en application des conditions de l’arrêté du 27 décembre 2019.

12. Comment les chartes sont-elles évaluées et approuvées ?

La charte transmise par les utilisateurs doit être évaluée en vue de son approbation dans un délai maximal de 2 mois. Le Préfet se prononce sur le caractère conforme et adapté des engagements qu’elle prévoit. A cette fin, il apprécie notamment :
– la conformité générale des mesures de protection avec les termes du décret et de l’arrêté ;
– l’organisation de la concertation, ses résultats et les suites, argumentées, qui y ont été données ;
– le caractère fonctionnel, y compris dans la durée, des modalités de dialogue et de conciliation entre les utilisateurs et les habitants.
S’il constate des manquements, le Préfet peut demander aux organisations qui ont élaboré la charte d’y remédier dans un délai maximum de 2 mois. L’approbation se matérialise par la publication du document sur le site internet de la Préfecture.
Le projet de charte n’est pas soumis à une obligation de consultation du public au titre du code de l’environnement.

13. Comment les résidents peuvent-ils avoir connaissance des chartes du département ?

Les chartes approuvées sont publiées sur le site de la préfecture. C’est cette version qui fait foi.

14. Quelles sont les obligations de l’utilisateur de produit phytopharmaceutique pour réaliser un traitement à proximité d’un bâtiment habité ?

L’utilisateur est tenu de respecter les dispositions prévues par l’AMM des produits épandus et les conditions d’utilisation prévues par la réglementation (vitesse limite du vent, etc…).
Lorsqu’il utilise des produits entrant dans le périmètre des chartes (voir question 26) à proximité d’un bâtiment habité, l’utilisateur applique, pour ce qui le concerne, les engagements figurant dans les chartes.
Ainsi, lorsque les conditions sont réunies (utilisation d’un matériel réduisant la dérive au niveau adapté), l’utilisateur peut réduire les distances de sécurité, en application des modalités prévues par l’arrêté du 27 décembre 2019.
En absence de charte ou lorsque les conditions prévues par la charte ne sont pas remplies, l’utilisateur ne peut pas réduire les distances de sécurité, y compris lorsqu’il utilise un matériel homologué réduisant la dérive de pulvérisation.
L’utilisateur doit disposer d’un exemplaire, le cas échéant dématérialisé, de la charte approuvée qui l’engage.

DISTANCES DE SECURITE

15. Quels sont les lieux à protéger par les distances de sécurité ?

L’article L. 253-8 du Code rural et de la pêche maritime mentionne « les zones attenantes aux bâtiments habités et aux parties non bâties à usage d’agrément contiguës à ces bâtiments ».

16. Comment se définit la distance de sécurité ?

Dans les cas les plus courants (maison individuelle construite sur un terrain de quelques centaines de m2), la zone à protéger est constituée de l’habitation et de la zone d’agrément attenante, et la distance s’établit à partir de la limite de propriété.
Cependant, les chartes peuvent prévoir certains cas particuliers dans lesquels la distance ne s’établirait pas à partir de la limite de propriété, dès lors que la zone d’agrément n’est pas fréquentée régulièrement.

17. Que peut comporter une zone de sécurité ?

Il n’y a pas d’exigence particulière concernant la nature de la zone de sécurité. Elle peut être traitée avec des produits auxquels les distances de sécurité ne s’appliquent pas (voir question 26).

18. Quels traitements sont concernés par les distances de sécurité ?

Les distances de sécurité mentionnées dans l’arrêté du 27 décembre 2019 s’appliquent au traitement des parties aériennes des plantes. On entend par là tout traitement qui peut donner lieu à l’émission directe ou indirecte du produit dans l’air (pulvérisation, poudrage, fumigation, aspersion, irrigation), y compris les traitements sur sol nu et les traitements herbicides.
La distance de sécurité de l’article 14-1 (20 mètres incompressibles) est applicable pour les traitements réalisés en milieu ouvert ou en milieu fermé. Par contre, les distances de sécurité de l’article 14-2 ne s’appliquent qu’aux traitements réalisés en milieu non fermé.
Le semis de semences traitées, l’incorporation de granulés dans le sol, le badigeonnage et le trempage ne sont pas soumis au respect des distances de sécurité.

19. Quels sont les produits concernés par la distance de sécurité incompressible de 20 mètres ?

Une distance de sécurité non réductible de 20 mètres doit être respectée pour toute application, seul ou en mélange, d’un produit :
– présentant certaines mentions de danger préoccupantes (H300, H310, H330, H331, H334, H340, H350, H350i, H360, H360F, H360D, H360FD, H360Fd H360Df, H370, H372 : cette mention figure obligatoirement sur l’étiquette du produit ;
– contenant une substance active considérée comme ayant des effets perturbateurs endocriniens néfastes pour l’homme selon les critères du paragraphe 3.6.5 de l’annexe II du règlement (CE) n° 1107/2009 du 21 octobre 2009.
Les mentions de danger d’un produit figurent sur son étiquette. Elles peuvent également être consultées sur la fiche de sécurité et sur le site ephy : https://ephy.anses.fr/
La liste des produits concernés est disponible à l’adresse suivante : lien.

20. Comment se définissent les distances de sécurité de l’article 14-2 ?

Les distances de sécurité applicables dépendent de la culture concernée :
10 mètres pour l’arboriculture, la viticulture, les arbres et arbustes, la forêt, les petits fruits et cultures ornementales de plus de 50 cm de hauteur, les bananiers et le houblon;
5 mètres pour les autres utilisations agricoles et non agricoles.

Le désherbage des cultures hautes (vergers, vigne etc.) présente une particularité dans la mesure où le traitement ne vise pas directement la culture, mais uniquement les adventices au sol. Il est habituellement effectué avec un matériel différent de celui qui est utilisé pour le traitement des parties aériennes de la culture en tant que telle.
Ainsi, la charte peut prévoir que la distance applicable pour la réalisation des traitements herbicides dans les cultures visées par la distance de 10 mètres soit de 5 mètres lorsque le matériel utilisé pour ce traitement est celui qui est utilisé pour les cultures visées par la distance de 5 mètres (pulvérisateur à rampe notamment).

21. A quelles conditions les distances de sécurité de l’article 14-2 de l’arrêté du 4 mai 2017 peuvent-elles être adaptées ?

Pour pouvoir adapter les distances de sécurité de l’article 14-2, l’utilisateur doit respecter toutes les dispositions prévues par la charte approuvée qui l’engagent. A cet égard, il doit utiliser un matériel de réduction de la dérive au niveau d’efficacité conforme à l’annexe 4 de l’arrêté du 27 décembre 2019.
Les distances de sécurité ne peuvent être inférieures à celles de l’arrêté du 27 décembre 2019.
La dernière version de la liste des matériels et des niveaux correspondants de réduction de la dérive a été publiée le 23 décembre 2019 (NS 2019-859). Elle recense les matériels présentant une efficacité minimale de 66%. Une prochaine actualisation permettra d’affiner la classification des matériels selon les différents seuils d’efficacité prévus par l’annexe 4.

22. Les lieux accueillant des personnes vulnérables sont-ils concernés par les nouvelles distances de sécurité établies par l’arrêté du 27 décembre 2019 ?

Oui, car le décret du 27 décembre 2019 indique que les distances de sécurité définies en application de l’article L. 253-7-1 du Code rural et de la pêche maritime pour les traitements réalisés à proximité des lieux accueillant des personnes vulnérables (c’est-à-dire les distances de sécurité définies par les arrêtés préfectoraux pour les cas où les mesures de protection adaptées ne peuvent pas être mises en œuvre) ne peuvent être inférieures aux distances de sécurité fixées par l’arrêté du 27 décembre 2019.

23. Les barrières physiques telles que les murs, les haies ou les filets peuvent-elles être prises en compte pour adapter les distances de sécurité ?

Pour l’instant, aucune barrière physique n’est inscrite à l’annexe 4 de l’arrêté du 4 mai 2017 comme moyen permettant d’adapter les distances de sécurité de l’article 14-2.
Des travaux sont engagés afin de définir les conditions dans lesquelles ces barrières pourraient être prises en compte pour adapter les distances de sécurité, après avis de l’ANSES.

24. Est-ce que les distances de sécurité s’appliquent dans le cas des traitements réalisés au titre de la lutte obligatoire ?

Les distances de sécurité peuvent ne pas s’appliquer pas aux traitements ordonnés au titre de la lutte obligatoire, sous réserve des dispositions spécifiques précisées par l’arrêté de lutte (ministériel, ou préfectoral par défaut).

25. Quels sont les produits qui peuvent être utilisés sans les distances de sécurité prévues par l’arrêté du 27 décembre 2019 ?

Il s’agit des produits de biocontrôle mentionnés à l’article L. 253-6 du code rural et de la pêche maritime, des produits à faible risque et des produits composés uniquement d’une ou plusieurs substances de base.
Cependant, lorsque l’AMM d’un de ces produits prévoit une distance de sécurité conformément à l’évaluation de l’Anses, celle-ci doit être respectée sans adaptation possible.
De plus, si l’un de ces produits présente une des mentions de danger mentionnée à l’article 14- 1, la distance de sécurité de 20 mètres doit être respectée.
Les produits dont l’AMM ne comporte pas de distance de sécurité et qui peuvent être utilisés sans les distances de sécurité prévues par l’arrêté du 27 décembre 2019 sont les produits de biocontrôle qui figurent sur la liste établie par le ministre chargé de l’agriculture ainsi que les produits autorisés dans le cadre de l’agriculture biologique (produits listés dans le « Guide des produits de protection des cultures utilisables en Agriculture Biologique » de l’INAO).
Les produits composés d’une substance de base ne sont pas des produits phytopharmaceutiques. Ils ne nécessitent pas d’AMM et il n’existe pas de liste pour ces produits. Cependant, les substances de base approuvées ainsi que leurs utilisations possibles sont répertoriées à l’adresse suivante : http://substances.itab.asso.fr/fiches-substances-de-base