Annoncé par le président de la République, le projet de loi d’orientation pour la souveraineté agricole et lerenouvellement des générations en agriculture a été présenté le mercredi 3 avril en Conseil des ministres.

Il vise à préserver la souveraineté agricole et alimentaire de la France, en donnant à notre agriculture lesmoyens de relever les défis du renouvellement des générations en agriculture et des transitions imposées par le changement climatique et la crise environnementale, ainsi qu’en simplifiant et sécurisant l’exercice de l’activité agricole.

Contexte

La France est le 6ème exportateur mondial de produits agro-alimentaires, et le premier pays producteur agricole enEurope, avec 17 % de la production européenne, devant l’Allemagne et l’Italie. En 2022, les exportations ont progressé de 36 % mais les importations ont, dans le même temps, augmenté de 12 %, notamment en fruits et légumes.

L’enjeu du renouvellement des générations et de l’attractivité du métier

  • En 2020, la France compte 389 800 exploitations agricoles pour une superficie de 27 millions d’hectares, soit la moitié de la superficie totale du territoire.
  • En 10 ans, plus de 100 000 exploitations agricoles ont disparu, et un tiers des agriculteurs partiront à la retraite au cours de la décennie à venir. Aujourd’hui déjà, certains peinent à trouver des repreneurs, posant laquestion du revenu des agriculteurs et plus largement de la politique à conduire pour accompagner cettetransition, notamment en matière de formation et de soutien à l’installation, dans un contexte où les exigences sociétales en matière d’alimentation sont fortes (environnementales, de sécurité sanitaire, de bien-être animal) et où, paradoxalement, la part du revenu consacré à l’alimentation reste En effet, là où les deux-tiers des revenus des Français allaient vers l’alimentation il y a deux siècles, ce chiffre est de 12 %aujourd’hui, et seulement de 2 à 3 % qui revient directement aux agriculteurs.
  • Près de 20 % des agriculteurs français ont déclaré un revenu nul, voire un déficit de leur exploitation en 2017 selon l’INSEE, alors que c’est l’une des professions où l’on travaille le plus. De toutes les catégoriessociales, les exploitants agricoles ont la mortalité par suicide la plus élevé.

L’enjeu de la transition agroécologique

L’agriculture est le deuxième poste d’émissions de gaz à effet de serre : 19 % du total national en 2019. Ces émissions sont àmettre en regard avec les capacités de stockage du carbone (prairies, forêts, agro-foresterie) de l’agriculture. Ce potentiel de stockage peut être accru en favorisant les pratiques bénéfiques (haies, agroforesterie, cultures intermédiaires).

Les émissions de gaz à effet de serre de l’agriculture ont diminuéde 8 % entre 1990 et 2019 contre 20 % de baisse tous secteurs confondus sur la même période. On rappellera que l’objectif général de réduction des GES est de 50 % à horizon 2050.

Ce que la loi prévoit

Le projet de loi s’inscrit dans un contexte géopolitique appelant à la nécessité de consolider notre sécurité alimentaire française et européenne et d’ériger cet impératif, comme l’une des priorités stratégiques de nos politiques publiques.

Face aux deux défis prioritaires identifiés par le texte, que sont le renouvellement des générations et les transitions agroécologiques et climatiques, les objectifs du projet de loi répartis en plusieurs grands axes (et en 19 articles) :

  1. Affirmation du caractère d’intérêt général majeur de l’agriculture, de la pêche et de l’aquaculture, qui garantissent la souveraineté alimentaire de la Nation ;
  2. Formation d’une nouvelle génération d’agriculteurs avec :
    • La mise en place d’un programme national d’orientation et de découverte des métiers de l’agriculture et de l’agroalimentaire (actions systématiques de découverte de l’agriculture en école élémentaire, offres de stages immersifs au collège et au lycée, promotion des métiers du vivant et desformations qui y préparent) ;
    • La création d’un « Bachelor Agro », diplôme bac+3, pour permettre aux futurs professionnels des secteurs agricole et agroalimentaire d’accroître leurs compétences ;
    • La formation en 3 ans de 50 000 professionnels de l’enseignement, du conseil, et de l’administration, sur les actions et solutions en faveur des transitions agroécologique et climatique, pour créer les conditions d’un véritable « choc de compétences » pour les secteurs agricoles et agroalimentaires.
  3. Donner un nouveau souffle à notre politique d’installation et de transmission :
  • Prévoir l’accompagnement individualisé de chaque personne qui souhaite s’installer outravailler en agriculture ou céder une exploitation avec l’instauration du réseau « France services agriculture », qui sera pensé dans une logique de rationalisation et simplification des parcours ;
  • Prévoir la mise en place d’outils de diagnostic et d’accompagnement qui permettront une évaluation des exploitations à la transmission, à l’installation et tout au long de leur cycle de vie, que ce soit sur le plan économique, social, écologique ou climatique ;
  • Créer des groupements fonciers agricoles d’investissement, outils de portage du foncier qui doivent permettre d’attirer, de manière maîtrisée et sécurisée, de nouveaux capitaux pour l’agriculture.

4. Sécuriser et simplifier le cadre de l’exercice de l’activité agricole avec :

  • L’adaptation du régime de répression des atteintes au droit de l’environnement, avec des procédures et des peines allégées ;
  • La réduction des délais de recours contentieux contre les projets agricoles et ouvrages hydrauliques, avec l’adaptation de différentes procédures (présomption d’urgence, régularisation des vices de procédure, entre autres) permettant aux agriculteurs une visibilité plus rapide sur la conformitéde leur projet au droit ;
  • La simplification et l’unification du régime applicable aux haies.

Le projet de loi sera examiné en séance publique la semaine du semaine du 13 mai 2024