Le Premier ministre a présenté, mercredi 11 décembre devant le CESE, le projet de réforme des retraites : un système universel, juste, solide et solidaire, une réforme annoncée et concertée.
Ce projet de réforme vient refonder le pacte entre générations issu du Conseil national de la Résistance, tout en l’adaptant aux évolutions de notre société, à la mobilité professionnelle et aux nouvelles formes de précarités.
De nouvelles avancées sociales vont être mises en place (retraite minimale à 1.000 euros, protections pour les femmes et les familles, solidarité vis à vis des agriculteurs, artisans et commerçants) et envoient un signal de soutien à la fonction publique (revalorisation indispensable des enseignants et chercheurs, intégration des primes des fonctionnaires, extension du régime de la pénibilité).
La fin des régimes spéciaux sera mise en place de manière très progressive.
Le projet du Gouvernement est articulé autour de trois principes
Principe n°1 : L’universalité
Le système sera le même pour tous les Français, sans logique de statuts, avec :
- Un système par répartition
- Un même niveau de cotisation, et la prise en compte des primes pour les fonctionnaires
- Un système en points : chaque heure travaillée ouvrira des droits
- La loi donnera des garanties sur la valeur du point : les partenaires sociaux fixeront sa valeur et son évolution, sous le contrôle du Parlement. La loi prévoira une règle d’or pour que la valeur des points acquis ne puisse pas baisser, ainsi qu’une indexation progressive sur les salaires qui augmentent plus vite que l’inflation.
- La fin progressive des régimes spéciaux
Principe n°2 : L’équité et la justice sociale
Le système protègera mieux les Français les plus fragiles
- Pension minimale de 1 000€ nets par mois pour une carrière complète au SMIC ;
- Fin de la pénalisation des carrières heurtées : chaque heure travaillée permettra d’acquérir des points et donc d’améliorer sa pension, points alloués pour compenser les périodes de chômage et de maladie
Les femmes seront les grandes gagnantes du système universel
- Compensation de la maternité à 100% ; points supplémentaires pour chaque enfant, et ce dès le premier enfant (5% par enfant) ; amélioration du système de la réversion
- Si nous nous engageons vers un âge d’équilibre, nous pourrons abaisser la borne des 67 ans qui est l’âge d’annulation de la décote pour ne plus pénaliser les femmes qui ont des carrières heurtées et leur permettre de partir plus tôt à taux plein
Le système sera favorable aux familles : au-delà des 5% par enfant, nous accorderons 2% supplémentaires aux parents de familles nombreuses de 3 enfants et plus.
Les plus hauts revenus seront mis à contribution : jusqu’à 120 000€ de revenus/an, tout le monde cotisera au même taux, pour s’ouvrir des droits dans la limite de ce montant. Au-delà de ce montant, les plus riches paieront une cotisation de solidarité plus élevée qu’aujourd’hui qui financera des mesures de solidarité pour tous.
Principe n°3 : La responsabilité
Responsabilité des acteurs : la gouvernance du système sera confiée aux partenaires sociaux, sous la supervision du Parlement.
Responsabilité qui nous oblige à bâtir un système sur des bases financières solides.
Sans les y forcer, nous devons inciter les Français à travailler plus longtemps : l’âge légal de départ à la retraite à 62 ans ne bougera pas. Et, au-dessus de l’âge légal, le Gouvernement compte reprendre la proposition du rapport Delevoye qui consiste à instaurer, un « âge d’équilibre », avec un système de bonus-malus.
Nous devrons donc protéger les salariés qui ne peuvent pas travailler aussi longtemps que les autres :
- Les personnes qui ont commencé à travailler tôt, avant 20 ans, pourront continuer de partir deux ans avant les autres
- Nous allons étendre et améliorer la prise en compte de la pénibilité : le compte pénibilité sera ouvert à la fonction publique et en particulier à l’hôpital
Les transitions et garanties
Sur l’entrée en vigueur du nouveau système
Ceux qui entreront pour la première fois sur le marché du travail en 2022 intégreront directement le nouveau système.
Pour les personnes qui sont déjà dans la vie active : rien ne change pour celles qui sont à moins de 17 ans de la retraite. « Toutes les personnes qui se projettent déjà dans leur retraite, qui l’ont préparée et planifiée dans l’ancien système, ne sont pas concernées par le système universel. »
Quant aux personnes qui rejoignent le nouveau régime : la transition sera très progressive, toute la partie de carrière effectuée jusqu’à 2025 donnera lieu à une retraite calculée selon les anciennes règles (pour la génération 1975, première concernée : 70% de sa retraite calculée selon l’ancien système). 100% des droits acquis dans les régimes actuels seront conservés. Et pour ne pas léser les régimes qui fondent leur calcul de retraite sur les 6 derniers mois (les enseignants, notamment), seront mis en place des dispositifs très protecteurs (revalorisation salariale).
Sur le retour à l’équilibre du système et l’introduction d’un âge d’équilibre : de cet équilibre dépend la pérennité de notre système par répartition
Ce sera la responsabilité des partenaires sociaux et nous mettrons en place dès l’année prochaine une gouvernance qui leur confiera les principaux leviers. Il leur reviendra de fixer une trajectoire de retour à l’équilibre puis de maintenir celui-ci, et de trouver les modalités pour atteindre l’âge d’équilibre de 64 ans dès 2027.
« Nous ne pouvons pas mettre en place un âge d’équilibre à 64 ans d’un coup d’un seul en 2025. J’ai entendu les organisations syndicales qui ne voulaient pas de fétichisme sur la date de 2025 et j’ai accepté de prendre le temps nécessaire en décalant le calendrier initial jusqu’à 2027. » (Edouard Philippe, discours au CESE, 11/12/19)
Si les partenaires sociaux s’entendent sur une telle trajectoire, le Gouvernement s’engage à la reprendre à son compte.
A défaut, un âge d’équilibre à 64 ans sera mis en place en 2027, avec un système de bonus-malus qui incitera les français à travailler plus longtemps.
Autres garanties : un système universel ne signifie pas la négation de toute spécificité
Les forces de sécurité intérieures conserveront le bénéfice des dérogations d’âge. Les gains représentés par les bonifications de durée seront préservés, des niveaux de retraite comparables aux pensions actuelles seront donc maintenus.
Pour les enseignants : le niveau des retraites des enseignants sera sanctuarisé. Les pensions seront revalorisées à partir de 2021. Jean-Michel Blanquer réunira les organisations syndicales afin de fixer le cadre sur les 10 prochaines années de la reconstruction des rémunérations, des carrières et des organisations du travail. En parallèle, Frédérique Vidal poursuivra les consultations sur la loi de programmation de la recherche pour aboutir également au premier semestre.
Pour les aides-soignantes à l’hôpital public : les seuils sur la reconnaissance de la pénibilité liée au travail de nuit seront adaptés.
Pour travailleurs indépendants, des transitions spécifiques seront mise en œuvre. S’agissant des réserves des professions libérales, elles resteront dans les caisses des professionnels concernés.
Le calendrier
Le projet de loi de réforme des retraites sera prêt à la fin de l’année, soumis au Conseil des ministres le 22 janvier et discuté au Parlement fin février.
Ce projet contiendra toutes les garanties annoncées, et renverra à des ordonnances ou à des décrets les précisions sur les transitions, car le dialogue social va continuer pour en préciser les modalités.
Au 1er janvier 2022, les nouveaux droits seront mis en place et les nouveaux entrants sur le marché du travail intégreront le régime.
En 2025, les générations qui sont à plus de 17 ans de la retraite intégreront le nouveau système en conservant tous leurs droits acquis. Leurs retraites, liquidées à partir de 2037, intégreront progressivement une proportion croissante du nouveau système.